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M. Huchard

Une bonne fricassée vermeille de fraises à jabot, parce que c’est dorénavant.
Le crépuscule sucré, de cuir orange et indigo, quai de gare hidalgo.
On va dire : ouvrir.
L’âme, ce chausse pieds transi à composter tout le temps, jamais de répit.
Transi de crépiter roue libre, ciels indolores et barbes à papa.
Oui à jabot, très important parce que c’est désormais.
D’autant que c’est pas très futé, d’engoncer le contraire, de nos jours.
Surtout pas de maman, en ce moment.
Certains les préfèrent moustachus les chausse pieds. Vous savez, comme on dit, tous les goûts sont dans la roue libre.
C’est vrai que ça devient de moins en moins simple, les quais de gare hidalgo, parce que carence de cuir, terrible carence de cuir.
Alors, il a regardé la fraise, M. Huchard, bien dans les oreilles.
Il a pris son élan et a plongé dedans.
Oui, M. Huchard a plongé dans la fraise, il s’est retrouvé à Versailles, un jeudi matin devant dorés quinze carrosses et haies de laquais au pied, je te le dis, au pied.
C’est comme le sel dans le crépuscule, lui aussi il est tout jabot et indigo et roue libre et crépitant.
Hé, M. Huchard, on est au courant, va.
C’est d’ailleurs le même jeudi que tout d’un coup il s’est mis à manger de la cervelle de paon, ail et ketchup.
Mais avec très peu de poivre, ça fait tousser l’âme, paraît il.
Il sera bien sûr question d’œuf, incontournable.
Dans l’œuf il y a un bug : l’œuf rêve d’avoir un oeuf, il se fabrique une poule. De tout temps ça se sait, ce genre de nabot à jabot.
C’est comme la patate chaude, tu te la mets dans le chausse pied et d’un coup t’as l’oeil à Venise, à multiplier les regards, masques et belles, estuaires de roses et de vin.
Tiens le v’la, le Huchard qui vient fourrer son nez. Avec sa grosse loupe et son cigare, sacré Huchard.
Dans une petite barquette il a trouvé des myriades de lagunes d’archipels moroses, les pauvres petites.
Carence de cuir, maman.
Faut pas croire, c’est pas moustachues du tout que les myriades se chaussent les pieds.
Ca dure depuis des patates d’âme sans sel.
Cette salade.
Raconter une salade tel est le vif du sens à jabot. Parce que les fraises dans les trains ca rend plus roux l’automne.
Bon il va toujours se trouver des gens pour dire : et l’œuf là dedans, qu’est qu’il vient branler ?
Eh oui, il y a des gens.
Ben le crépuscule aussi, tant qu’on y est, le cuir, allons y, le sel, les fraises, Huchard...
Non, non, pas jusques et y compris.
Ce qui est bien, certains jeudis matins, c’est que l’œil.
En fait, c’est tous les jours jeudi matin.
L’œil du matin mate et tâte, tic avec subtil tact les tractations de chaque instant avec le suivant.
Moite passation de merveilles, monceaux de pâmoisons
Jusqu’à l’ultime, le match.
Plein de fraises au stade , un peu de sel, pas mal de poivre cette fois, un oeuf, tout ça autour de ce sacré veinard de Huchard, regardez moi ça, t’es bien là hein Huchard !
Au fond du jardin, cabane à vélos si fer que putain de poivre. Et pourtant pas si fer que ça, sans sœur qui sait y faire, la cabane, à bien cligner de l’âme.
Beaucoup de raisons pour ça, d’abord la cabane à vélos si chose ne peut pas contenir de match, ni de fraises, et encore moins d’œuf.
Trois fois rien par trois fois rien ça fait rien de n’œuf. Disent les cingalais chaque jeudi matin.
On est toujours jeudi matin.
Dare-dare l’Huchard va aux fraises celles qui sans quoi.
Pas assez de patate dans les vagues malgré les murs, dont les oreilles dépassent les carrosses laquais, ça se voit.
D’ici.
Pour dire, c’est exactement pour ça qu’il a décidé, en une fraise matinée de jeudi, de simple sur le quai. L’âme en bandoulière, les yeux plein de sel en criques poivrées suspendues.
C’est dans ses mains qu’il tient le stade, le match, l’oeuf.
Il sifflote un vieil air vigneron, de la gigue en fûts. Sur le perron de sa mémoire, tombent des vagues l’une sur l’autre, courrier estimentiel, enfance chenue dans les granges d’hiver, vieux pan d’hélice de Messerschmitt.
Comme sur la photo, il se regarde se rit beau à lui, à soi, normal, il se reprend une bière au bar.
Salut tout le monde, c’est la fête !
Sur scène, le sel à la basse, le poivre à la batterie, une fraise à la guitare, une autre au piano,et les vagues, bien sûr, au chant.
Hidalgo, l’orange cuir crépuscule, le grand tresseur de salades, l’Homérien saleur de fraises.
Le salut est basé sur la Quiddité du cuir, salé ou pas c’est selon celui qui.
Moult oiseaux de gel, à siffler prune et or, le vieux canapé clouté, la mappemonde de l’oeuf.
Tout ça il l’avait bien fraisé, pensez vous, le sable des coquines minutes, popotin french cancan avec riffs de cuivre.
File la pelote, la Madelon et Huchard qui se marre, encore une autre ? Allez on est reparti.
Pour beaucoup, les vagues sont vierges, pour d’autres non. La vérité c’est qu’âme sans ruines n’est que conscience de science.
A partir de là on peut même déclarer que les équinoxes sont équivoques.
Parce que tu mets du sel sur de la fraise, ça te poivre tout de suite les vagues jusqu’aux moustaches des jeudis matin, justement.
C’est là où il est le bordel.
De loin en loin, il nous a tous appris, M. Huchard, à apprivoiser les équinoxes. Les équivoques ça sera pour plus tard, avait-il dit, trop de carence de cuir en ce moment.
On s’en souvient tous, de ce moment, quand il a disparu, nuage pistache sur ciel rose.
On ne l’a plus jamais revu.
Depuis ce jour, à chaque tombée du soir, on se rassemble, cabane à vélos, fond de jardin.
Tout le monde vient les mains pleines de fraises, de vagues, de sel, d’âme, de murs, de poivre, de moustaches.
On attend tous le retour de M. Huchard.

Aziz Chouaki

Eric Didym